Le vent en poupe

Publié le samedi 27 octobre 2001 par admin_sat

Un ouvrage sur les langues, deux émissions - respectivement de Radio France Internationale (RFI) et de France Culture - et beaucoup d’autres faits récents montrent que la langue internationale popularisée sous le nom d’espéranto a effectivement « le vent en poupe » comme l’a dit Catherine Framery, animatrice de l’émission « Accents d’Europe » sur RFI.
En Côtes d’Armor, un stage international d’espéranto, auquel ont participé 160 personnes, a dû refuser des inscriptions.
En Vendée, nous n’avons pas assez d’enseignants pour répondre à une demande très dispersée. Alors ?
Langues sans frontières
Présenté de manière plus détaillée dans le Service de Presse de SAT-Amikaro, l’ouvrage paru sous ce titre est signé par un ancien fonctionnaire international. Polyglotte, il parle, écrit et traduit une cinquantaine de langues d’Europe et d’Asie. Ce livre permet de découvrir les aspects linguistiques non seulement de 39 langues de l’Europe, mais aussi de l’espéranto. Les personnes qui n’en connaissaient pas l’existence, ou qui n’en avaient qu’une vague idée, pourront en percevoir le génie et les ressources.
France Culture
Jean-Claude Lescure est aujourd’hui le seul historien français à avoir de réelles compétences en matière d’histoire de l’espéranto.
Il était l’un des invités de l’émission « Tire ta langue ! » diffusée sur France Culture (21.09).
Lus à l’antenne, des passages du roman « Voyage d’études », sur lequel travaillait Jules Verne avant sa mort, ont rappelé que ce visionnaire avait ainsi voulu soutenir l’espéranto auquel il avait pressenti une belle destinée : « L’espéranto, c’est le plus sûr, le plus rapide véhicule de la civilisation », dit l’un de ses héros.

La lecture du décret par lequel, en 1922, le ministre de l’instruction publique, Léon Bérard, avait interdit l’utilisation des locaux scolaires pour l’enseignement de l’espéranto, aurait cependant exigé des éclaircissements : abrogé en 1924 par le gouvernement d’Édouard Herriot, ce décret était à mettre en parallèle avec celui, tout aussi infâme, qu’émit Bernhard Rust, ministre de l’éducation du IIIe Reich, en 1935.

L’explication de ces interdictions se trouve dans une vision exacerbée du nationalisme dont chacun peut, encore aujourd’hui, constater les méfaits. « Noyer la poussée de l’espéranto » était le mot d’ordre. Il fallait donc souiller et déformer son image, l’accuser de tous les maux.
Radio France Internationale

Chose rare jusqu’à ce jour, une station de portée internationale, RFI, qui émet en 19 langues et couvre une large partie du globe, a fait appel à quatre de ses correspondants - Allemagne, Pologne, Pays-Bas et Grande-Bretagne - afin d’obtenir divers échos sur l’espéranto pour son émission « Accents d’Europe », une coproduction de la Deutsche Welle, de la BBC et de RFI.

Mis à part le nombre erroné de locuteurs actuels de l’espéranto (250 millions !) indiqué par la correspondante de RFI en Pologne, cette émission nous a sortis des platitudes et banalités qu’on a pu lire et entendre ici et là durant des décennies. Avec des émissions plus fréquentes d’une telle qualité, l’objectif de 250 millions d’espérantophones n’aurait guère de mal à être atteint en moins d’une génération.

L’enseignement des langues par l’Institut Narval a fait l’objet d’un excellent reportage de la correspondante de RFI aux Pays-Bas. C’est au sein de ce même Institut que se déroule l’expérience Dialogues indigènes dans laquelle l’espéranto se révèle d’une grande efficacité. Elle vise à favoriser un dialogue constructif sans frontières, en particulier entre les minorités.
Correspondant de la BBC, Philippe Auclair a pour sa part dressé un portrait étonnant de l’un des grands pédagogues musicaux du XXe siècle, le compositeur et humaniste Franck Merryck, professeur au Collège Royal de Musique. Merryck, qui a écrit « L’espéranto est une langue qui récompense largement celui qui la chante », a produit bon nombre de mélodies à partir de poèmes des plus grand poètes de l’espéranto dont Kálmán Kalocsay (Hongrie), Marjorie Boulton (Angleterre), Lucien Thévenin (France). Le cas de Merryck montre que la communauté espérantophone a créé des richesses dont le public n’a guère conscience.
Auteur de l’ouvrage Le défi des langues, Claude Piron (Suisse) a soulevé le problème du « masochisme linguistique » dont notre société est incapable de se libérer, ajoutant qu’elle en reste à des palliatifs coûteux alors que, par exemple, ìen politique, la force de conviction est d’une importance capitale.

Il y a beaucoup de belles découvertes à faire sur l’espéranto et avec l’espéranto. Le public, auquel Internet permet enfin de le juger sans passer par l’avis de personnes qui n’en connaissent rien, n’a pas fini de s’étonner. Cette émission constitue une surprise fort agréable comme on en aimerait beaucoup d’autres ! On ne peut qu’en remercier l’animatrice : Catherine Framery.